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Noblesses de Bretagne

 | 
Jean Kerhervé

Fidélités et perspectives dynastiques dans la noblesse bretonne lors de la crise de succession (1470-1491)

Michel Nassiet

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Géographique :

France

Texte intégral

1Dans la crise de succession dynastique qu'a subie le duché de Bretagne dans la décennie 1480 et jusqu'en 1491, la noblesse bretonne avait les moyens de jouer un rôle important, à deux titres au moins, qui nous semblent devoir faire tous deux l'objet d'une réévaluation.

  • 1 « On en trouve la preuve dans les nombreux mandements comminatoires que le duc est obligé de lancer (...)
  • 2 M. Nassiet, Noblesse et pauvreté, 1993, p. 91.

2Du fait du service militaire féodal, la noblesse constituait la principale composante des forces armées du duché. L'enjeu historique de ce fait est d'autant plus important que l'issue d'une confrontation armée avec le roi n'était pas fatale. Du côté breton, des villes ont résisté, et les capitales ducales étaient difficilement prenables par un siège. Pour les armées royales, il était relativement facile d'envahir le duché, comme l'a montré la campagne de 1488, mais il était bien plus difficile de s'y maintenir tant que ce pays restait hostile, comme l'a montré l'écroulement du dispositif militaire français en 1489. Même pour livrer une bataille rangée, les effectifs ducaux pouvaient être relativement élevés. Dans le duché de Bretagne, comme dans celui de Bourgogne, le service militaire féodal dû au souverain était mieux organisé que ne l'était le ban et l'arrière-ban dans le domaine royal, à cause surtout de l'homogénéité institutionnelle qui pouvait exister dans une principauté d'étendue relativement réduite, tandis que dans le vaste domaine royal, les structures économiques et sociales variaient sensiblement d'une province à l'autre. Bien organisé, le service militaire féodal pouvait procurer au duc plusieurs milliers d'hommes, il est vrai pour une durée limitée. En cas de mobilisation de cette force, tout dépendait de la détermination de ces hommes, teneurs de fiefs, et de leur attachement personnel au duc et à sa dynastie. L'idée qui prévaut à ce sujet parmi les historiens est celle qu'a formulée Pocquet, selon laquelle une bonne partie de la noblesse bretonne aurait déjà été gagnée à la cause royale. L'interprétation de Pocquet repose sur deux observations. La première porte sur les multiples intrigues effectivement fomentées, à partir de 1484 surtout, par quelques grands personnages de l'aristocratie bretonne, comme le maréchal de Rieux. Ces intrigues ne furent certes pas négligeables car elles divisèrent le pouvoir ducal et contribuèrent à le paralyser, mais elles ne doivent pas distraire notre attention des processus décisifs, qui étaient ailleurs. Pocquet voyait à juste titre un moyen d'observer la fidélité de la masse de la noblesse dans le résultat des montres générales, c'est-à-dire des revues que le pouvoir ducal faisait passer aux teneurs de fiefs pour préparer leur mobilisation militaire. Il a constaté que les commissaires ducaux avaient dû prononcer « beaucoup1 » d'injonctions pour que les feudataires présentent un équipement suffisant, ou même pour qu'ils n'omettent pas de se présenter. Mais le caractère qualitatif de la méthode restreint la pertinence de cette observation. Si Pocquet a trouvé « beaucoup » d'injonctions, c'est-à-dire beaucoup de rappels à l'ordre, c'est d'abord parce qu'il y avait aussi « beaucoup » de feudataires, un peu plus2 de 10 000 en 1480. Ce qu'il faut préciser, c'est la proportion des défaillants, ce qui exige une mesure. C'est à celle-ci que nous nous proposons de procéder ici, dans plusieurs montres de 1480.

  • 3 Expression de J.-P. Leguay, p. 406.

3Mais ce n'est pas seulement sur le terrain militaire que se situait le processus décisif. Il est douteux que « le sort de la Bretagne « ait été « réglé3 » sur le champ de bataille de Saint-Aubin-du-Cormier, comme on a l'habitude de le penser à la suite de l'histoire militaire traditionnelle. Le discours historique selon lequel la réunion du duché au domaine royal aurait été inévitable repose sur le fait que les finances du premier ne lui permettaient pas de supporter un effort de guerre très long ; mais le roi très chrétien ne pouvait pas faire au duché une guerre totale, car il ne pouvait ignorer qu'une principauté a des héritiers légitimes. Aussi la destinée d'une principauté dépendait-elle, en dernière analyse, de celle de la lignée qui en occupait le trône. La crise de succession subie par la Bretagne sous François II consiste en un fait de nature familiale : la lignée est tombée en quenouille.

  • 4 Nous avons esquissé une étude historique comparative de ces crises de succession selon ce point de (...)
  • 5 ADLA, E 147. Dom Morice, III, 439-440, et 500.

4Une telle occurrence était très fréquente, tant au niveau dynastique que dans l'ensemble des noblesses, à la fin du Moyen Âge et jusqu'au xviie siècle au moins. C'est la chute des lignées ducales en quenouille qui a été à l'origine des réunions, au Domaine royal, non seulement de la Bretagne, mais aussi du duché de Bourgogne et de l'ensemble des possessions de la maison de Bourbon, réunions qui ont considérablement aggravé le caractère centralisé du royaume. Sans doute parce qu'ils les considèrent comme purement aléatoires, les historiens n'ont guère essayé de penser ces phénomènes comme des faits sociaux, méritant d'être étudiés comme tels4. Lorsqu'une dynastie tombait en quenouille, c'est-à-dire n'avait que des filles, la lutte politique consistait en une compétition pour son patrimoine et pouvait comprendre deux aspects : la contestation éventuelle du droit de la fille à l'héritage, d'une part, et le mariage de la fille héritière, de l'autre. Dans le cas de la Bretagne, le prétendu droit acquis par Louis XI n'avait aucune valeur, et le dénouement de la crise consistait dans le mariage de la fille aînée dès lors qu'elle était reconnue héritière. On sait que les états de Bretagne reconnurent les deux filles du duc comme héritières le 8 février i486, et que le duc avait fait jurer5 au vicomte de Rohan de servir ses filles comme « vraies héritières du duché » dès septembre 1484. À partir de ce moment, le pouvoir ducal breton a pris un risque mortel en ne mariant pas l'héritière alors qu'il avait encore la maîtrise complète de cet acte, jusqu'en 1488, voire 1490.

  • 6 L. Stone, 1965, p. 656-658.

5Pour une seigneurie, et a fortiori pour une principauté, l'occurrence d'une héritière était un risque d'instabilité parce qu'elle suscitait des convoitises. Cette instabilité était aggravée si l'héritière était déjà orpheline de son père. La seule façon de clore cette période d'instabilité était de la marier au plus vite. C'est ainsi que Marie de Bourgogne a été mariée l'année même de la mort du duc son père. Dans l'aristocratie anglaise6 du xviie siècle, où pourtant l'enjeu des successions ne s'élevait évidemment jamais au niveau politique et étatique, les héritières étaient souvent mariées entre dix et douze ans, quitte à ce que la consommation de leur mariage fût retardée. Au contraire, et alors pourtant que montaient les menaces, le pouvoir ducal a tergiversé, en envisageant des alliances flatteuses avec des maisons illustres mais lointaines. Il est vrai que le mariage avec la maison de Habsbourg semblait promettre la reproduction de l'alliance militaire de revers avec la maison de Bourgogne, qui avait été fort utile à la Bretagne dans les décennies 1460-1470 ; mais il était illusoire d'espérer que les Habsbourg puissent envoyer un contingent militaire important en Bretagne. En outre, la perpétuation du duché et de son indépendance aurait été mieux assurée par une alliance avec une maison qui ne fût pas trop grande, de telle sorte qu'il n'y ait aucun risque de réunion à un grand Etat. Les partis possibles n'étaient pas très nombreux.

  • 7 Bibl. mun. Nantes, fonds Bizeul ; publié par dom Morice, III, 463, et S. de LA Nlcolliere-Teijero, (...)
  • 8 A. La Borderie et B. Pocquet, p. 563.
  • 9 G. Duby, dans Famille et parenté..., p. 251 ; exemples dans G. Duby, 1953, p. 463, 626.
  • 10 Nous l'avons ébauchée dans M. Nassiet, « Réseaux de parenté et types d'alliance dans la noblesse (x (...)

6Or, et c'est le deuxième titre auquel la noblesse bretonne proposait une résolution de la crise, un projet matrimonial a été élaboré suffisamment tôt par le chef d'un de ses premiers lignages : le vicomte de Rohan a voulu marier ses deux premiers fils aux deux filles du duc, en vue de quoi il a même obtenu en mai 1485 l'accord et l'engagement écrit7 du maréchal de Rieux. Les historiens n'ont guère prêté attention à ce projet parce qu'ils n'y ont vu que le produit de la vanité d'un personnage et d'un lignage, et une intrigue de même nature que celles fomentées par d'autres chefs de lignages de l'aristocratie bretonne. Pourtant ceux-ci n'imaginaient que des révolutions de palais, tandis que Rohan avançait un projet matrimonial, susceptible donc de perpétuer la lignée ducale. C'est encore Pocquet qui a prononcé une condamnation historique de ce projet Rohan ; il considérait que l'alliance de l'héritière du duché avec la lignée vicomtale de Rohan était « inadmissible et choquante » et aurait été une « mésalliance8 ». Mais lorsque l'on procède à une caractérisation, il faut que le concept que l'on emploie ait été préalablement défini. Or Georges Duby, puis d'autres historiens médiévistes, ont signalé la fréquence d'un type de mariage dans lequel « les garçons épousaient... des filles d'un rang supérieur au leur », type que l'on peut nommer « hypogamie des filles9 ». En une période où elle était encore fréquemment pratiquée, l'hypogamie constituait une norme matrimoniale, d'ailleurs pas nécessairement unique, si bien que tout mariage inégalitaire n'était pas nécessairement une mésalliance ; il n'y avait mésalliance que lorsque la distance sociale entre les deux partis était excessive. Une étude générale de l'alliance matrimoniale est donc nécessaire : c'est seulement après qu'ont été décelées et explicitées les normes matrimoniales prévalant lors d'une époque donnée, qu'il devient possible d'examiner si un mariage particulier, un contrat ou un projet, leur étaient conformes. Nous n'avons pas la place de développer ici cette analyse10, mais à la fin du xve siècle, l'hypogamie des filles était encore fréquente. Ici, nous étudierons si les mariages de deux fils Rohan avec les deux filles du duc pouvaient paraître conformes aux normes de mariage d'une grande héritière.

La masse de la noblesse : assiduité militaire et fidélité

La hiérarchie des revenus

  • 11 Bibl. mun. Saint-Brieuc, ms 31, 33, 35, 38. M. Nassiet, « Dictionnaire des feudataires des évêchés (...)

7Tentons donc de construire un indicateur de la fidélité de la noblesse envers le duc en mesurant la proportion des défaillants dans les montres des feudataires en 1480, dans les évêchés de Dol et Saint-Malo, dans celui de Saint-Brieuc et celui de Tréguier11 Comme l'enjeu de l'enquête réside dans les forces militaires que la noblesse pouvait fournir au duc, la mesure doit distinguer la proportion des présents et des défaillants selon qu'il s'agit de la noblesse riche, fort peu nombreuse ; de la noblesse moyenne et de la petite noblesse encore relativement aisée, nombreuses et effectivement capables de fournir des combattants avec un équipement ; de la noblesse pauvre enfin, qui n'avait pas les moyens de s'équiper et dont on ne pouvait pas vraiment espérer une contribution militaire réelle. Aussi n'est-il pas inutile de commencer par une présentation de la noblesse bretonne, de ses revenus et de ses effectifs.

  • 12 Dom Morice, II, 1133-1134 ; 1287-1291.
  • 13 Dans la montre de l'évêché de Rennes de 1541, dans presque chaque article, le montant du revenu est (...)
  • 14 ADLA, B 8,f° 96 v°.
  • 15 -Ce qui montre bien que le chiffre de revenu était porté à l'avance, c'est que dans les rôles breto (...)
  • 16 En 1481, à la montre générale de l'évêché de Cornouaille, était présent le procureur du duc, « comm (...)
  • 17 Par exemple, « Anceau de Botmeur, archer en brigandine, et dampuis a remonstré le procureur de Corn (...)
  • 18 Pour plus de détails, M. Nassiet, 1990, p. 184 ; pour une étude critique des chifres de revenu, Id. (...)

8Une donnée fondamentale fournie par plusieurs rôles de « montre » vers 1480 est l'estimation chiffrée du revenu de la plupart des feudataires. En effet, le service militaire féodal a été réorganisé dès 1452 par une ordonnance ducale ; celle-ci a défini des classes de revenu noble, en monnaie bretonne (d'une valeur supérieure d'un cinquième à la livre tournois), pour préciser le type de service auquel elles assujettissaient. Un feudataire devait fournir un homme d'armes au-dessus de 140 livres, puis, à partir de 1467, au-dessus de 200 livres12. Le revenu ainsi évalué était le total du revenu des biens qui assujettissaient le feudataire au service militaire ducal, c'est-à-dire le revenu de ses fiefs, autrement dit de ses biens nobles, sans y inclure la rente des terres roturières, ni les gages ou les bénéfices provenant d'une activité, ni les pensions ducales ou royales13. Il va sans dire que ces chiffres de revenu n'étaient qu'une approximation, et il est probable qu'ils soient empreints d'une certaine dissimulation fiscale. Mais même sous-évalués, il fallait bien qu'ils aient quelque vraisemblance. Les montres donnaient lieu à un certain contrôle : les commissaires examinaient l'équipement des feudataires ; les officiers ducaux vérifiaient que ce dernier était bien conforme à ce que devait l'intéressé, et tâchaient aussi de vérifier le montant de son revenu. En 1477 par exemple, le duc fit mandement « de tenir les montres générales des nobles, anoblis, sujets aux armes... le 15 juin » ; les procureurs ducaux devaient s'y rendre munis des « précédents registres des montres... et des facultés desdits nobles et sujets aux armes, afin que lesd. Commissaires puissent savoir si chacun se présente en l'état auquel il est tenu14 ». On avait porté sur le registre, à l'avance15, le revenu de chacun. Lors de la montre générale, en armes, le procureur ducal faisait écrire et enregistrer16 les résultats de l'évocation : les défauts des uns, les excuses de certains autres, et enfin, à propos des présents, le fait que leur équipement était convenable ou avait motivé quelque injonction. Le procureur du duc enquêtait sur le revenu de certains, et lorsqu'il constatait qu'un feudataire avait un revenu qui motivait un équipement supérieur, il en informait les commissaires, qui enjoignaient à l'intéressé, si l'on peut dire, un redressement militaire17. Le fait que le chiffre de revenu était porté à l'avance permettait de procéder à des enquêtes pour le vérifier, puis de contrôler l'équipement des comparants. De façon générale, l'ordre de grandeur des revenus seigneuriaux n'était pas ignoré, ni des seigneurs, ni des paysans aisés qui voulaient prendre leurs biens à ferme18. Aussi ces chiffres nous donnent-ils du moins un ordre de grandeur admissible, et surtout un instrument de comparaison.

9Comme souvent, la moyenne des revenus est gonflée par les valeurs supérieures, et le revenu médian est un indicateur plus représentatif. Dans la moitié septentrionale du duché, de Dol jusqu'au Léon, le revenu noble médian varie de 28,6 livres dans l'évêché de Tréguier jusqu'à 16 livres dans le Léon. On mesure l'écart avec les premiers rangs de la noblesse riche quand on sait que le plus riche seigneur de l'évêché de Saint-Malo avait un revenu de 4 000 livres, et que le vicomte de Rohan avait, rien qu'en Bretagne, et sans compter les biens propres de son épouse, 7 500 livres de revenu ; la distance entre le centre de gravité de la population nobiliaire et le niveau supérieur était donc considérable.

10Dans les évêchés orientaux de Dol et Saint-Malo, le revenu noble médian n'était pas tout à fait le plus élevé, mais c'est là que nous trouvons la moyenne la plus haute, ce qui montre que les strates supérieures y étaient plus riches et plus nombreuses que plus à l'ouest. L'évêché de Saint-Brieuc avait déjà les effectifs les plus nombreux de tout le duché ; les revenus moyen et médian n'y étaient pas aussi bas qu'en Léon, malgré l'hypertrophie de la strate des plus petits feudataires, exceptionnellement nombreux au niveau de 1 à 3 livres de revenu noble (Cf. graphique 1).

Tableau 1 - Effectifs et revenus des feudataires en 1480. (Revenus en livres monnaies.)

Tableau 1 - Effectifs et revenus des feudataires en 1480. (Revenus en livres monnaies.)
  • 19 Ibidem, p. 50.
  • 20 M. Nassiet, « Dictionnaire... », 1992, p. 248-250 ; 1996, p. 22.

11Ce niveau des revenus médians, de 15 à 30 livres, tâchons de le situer concrètement. La ration céréalière pour assurer la subsistance d'une famille de cinq à six personnes pouvait alors coûter 8 à 9 livres en pain de froment, ou seulement 6 livres en pain de seigle19 ; le revenu médian constituait donc en fait le triple ou le quadruple du coût du minimum vital. Au surplus, à la campagne, un petit domaine permettait de satisfaire les autres besoins élémentaires en procurant les produits de l'élevage, le bois de chauffage, des fibres textiles, et un logis plutôt moins exigu que celui des paysans. Il semble qu'une famille ayant une vingtaine de livres était même capable, vers 1500, de faire construire un vrai petit manoir, avec des murs bien appareillés, un étage et une vis d'escalier. D'autant que le revenu des biens nobles n'était pas le seul revenu des feudataires, qui y ajoutaient souvent la rente de propriétés roturières, ainsi que les revenus de quelque activité. La plus fréquente était sans doute la plus accessible, l'exploitation agricole. Une recherche de type prosopographique nous a permis d'identifier les activités de nombreux feudataires, et de réunir, pour chaque type d'activité, les chiffres de leur revenu noble20 ; les valeurs médianes de revenu qui en résultent dressent une significative hiérarchie des activités et des emplois.

Tableau 2 - Revenu noble par emploi et statut (évêchés de Dol et Saint-Malo, 1840). (Revenus en livres monnaies.)

Tableau 2 - Revenu noble par emploi et statut (évêchés de Dol et Saint-Malo, 1840). (Revenus en livres monnaies.)

Graphique 1 — Effectifis et revenus des feudataires de quatre évêchés en 1480.

Graphique 1 — Effectifis et revenus des feudataires de quatre évêchés en 1480.
  • 21 J. Kerhérve, op. cit., 1987, p. 229.
  • 22 Ibid., p. 324.
  • 23 Pour des cas nominatifs, M. Nassiet, 1996, p. 1 l-12..Pour l'exemple de Guillaume de Rosnyvinen, M. (...)

12L'emploi le plus prestigieux était sans doute la maison du duc21 ; la plupart de ses membres avaient en propre plusieurs centaines ou même plusieurs milliers de livres de revenu ; il s'y ajoutait alors des gages de l'ordre de 400 ou 300 livres. La qualité de soldat des compagnies d'ordonnance du duc est mentionnée dans les montres des feudataires et l'on peut penser qu'elle l'est exhaustivement puisqu'elle dispensait du service féodal. Au-dessous de dix livres de revenu noble, quelques petits feudataires purent se faire employer comme archers dans les compagnies d'ordonnance ducales, ce qui leur permettait d'avoir droit à une solde22 régulière grâce à un emploi conforme à la vocation de leur groupe social. Des seigneurs de moyenne noblesse étaient hommes d'armes. Les militaires gratifiés du gouvernement d'une ville furent parfois de petits nobles aisés, mais plus souvent c'étaient des personnages de moyenne noblesse23. Dans l'ensemble, comme les effectifs militaires réguliers étaient encore réduits, les compagnies d'ordonnance n'employaient que 3 % à 4 % de la noblesse bretonne.

  • 24 Kerherve, op. cit.. p. 723.

13Les principaux officiers de justice des grandes juridictions étaient des hommes de moyenne noblesse, ayant en propre quelques centaines de livres ; les hommes de la petite noblesse aisée, ayant plusieurs dizaines de livres, étaient lieutenants des grandes juridictions, ou premiers juges des petites juridictions seigneuriales, ou notaires, ou receveurs de l'impôt ducal. La moitié des officiers de finances étaient nobles24 ; globalement, ces nobles ayant des activités de finance tenaient des fiefs d'un revenu inférieur à ceux des officiers de justice, conformément au prestige moindre de la finance. D'autres petits nobles étaient marchands ou hôteliers, ou, à un niveau plus modeste, taverniers.

14Quant aux feudataires roturiers connus, leur revenu noble médian était sensiblement inférieur à celui de la noblesse ; la bourgeoisie avait alors à peine commencé à acquérir des fiefs. Les anoblis ne tenaient que de très petits fiefs (revenu médian de 5 livres).

La proportion des défaillants

  • 25 M. Nassiet, Noblesse et pauvreté, op. cit., p. 49.

15Les proportions des défaillants en fonction du revenu noble sont données par le tableau n°3, dont le graphique n°2 donne une courbe représentative pour l'évêché de Saint-Brieuc ; nous en avons déjà publié une courbe représentative en réunissant les évêchés de Dol et Saint-Malo25. La régularité de ces courbes nous paraît très significative. Très élevée au niveau des revenus les plus bas, la proportion des défaillants diminue très vite dès que le revenu augmente un peu. Les défaillants restaient très minoritaires parmi les feudataires ayant plusieurs dizaines ou plusieurs centaines de livres. Ce n'était que dans la noblesse très riche, au-dessus de 1 000 livres, que les défauts redevenaient nombreux.

Tableau 3 -Proportion des défaillants par classes de revenu

Tableau 3 -Proportion des défaillants par classes de revenu
  • 26 M. Nassiet, « Dictionnaire des feudataires des évêchés de Dol et Saint-Malo... », 1992, p. 251.

16Note 2626

Graphique 2 - Proportion des défaillants par classes de revenu dans l'évêché de Saint-Brieuc, 1480

Graphique 2 - Proportion des défaillants par classes de revenu dans l'évêché de Saint-Brieuc, 1480

Revenu annuel (en livres monnaie de Bretagne)

17Les variations par évêché ne sont pas négligeables ; à tous les niveaux de revenus, les défaillants étaient moins nombreux dans l'évêché de Tréguier que dans ceux de Dol et Saint-Malo et dans celui de Saint-Brieuc. Dans ces quatre évêchés, il n'y avait pas moins de trois quarts de défaillants dans la classe de 0 à 2 livres de revenu noble. De 3 à 10 livres, dans les évêchés de Dol, Saint-Malo et Saint-Brieuc, les défaillants formaient encore une moitié. À une vingtaine de livres, il n'y en avait plus qu'un tiers dans les évêchés de Dol et Saint-Malo, un quart dans celui de Saint-Brieuc, et moins d'un cinquième dans celui de Tréguier. Cette régularité de la baisse des défauts en fonction du revenu noble montre qu'à ces niveaux, la défaillance était provoquée par l'insuffisance du revenu et des moyens matériels : les plus petits feudataires ne pouvaient s'équiper ni faire face aux autres frais du service militaire. À moins de 5 livres, c'était plus de la moitié des teneurs de fiefs qui étaient incapables d'effectuer le service féodal. Or celui-ci était pourtant la principale occasion de manifester la vocation militaire de la noblesse. Cette classe de revenu, incapable d'assumer le service intimement lié à son statut, constituait une noblesse pauvre, une plèbe nobiliaire.

18À partir d’une dizaine de livres de revenu noble, seuil vers lequel commençait une petite aisance, la défaillance en 1480 fut régulièrement très minoritaire. Elle tombe à 10 % seulement dès le niveau de 25 livres dans l'évêché de Tréguier, de 40 livres dans celui de Saint-Brieuc, de 70 livres dans ceux de Dol et Saint-Malo.

  • 27 ADLA, B 2184.
  • 28 En Lanmeur, ADLA, B 1785.
  • 29 ADLA, B 2118.
  • 30 Comte de Rosmorduc, 2, p. 135. ADLA, B 1610. M. Nassiet, « Dictionnaire... », 1996, n° 3 022 et 355 (...)
  • 31 A. Du Paz, p. 446. Les trois capitaines qui assiégèrent Quintin en 1487 pour le duc étaient des hom (...)

19Tout autant assidue était la moyenne noblesse, ayant des revenus de plusieurs centaines de livres. La proportion de ses défauts était souvent de l'ordre de 10 % également et restait presque toujours inférieure à un quart. Cette forte assiduité de la moyenne noblesse paraît d'autant plus significative que beaucoup de ses membres se sont fait tuer huit ans plus tard à Saint-Aubin-du-Cormier. Il en fut ainsi d'Arthur de la Marzelière et de René de Montbourcher, de l'évêché de Rennes27 ; de François de Boiséon28, qui avait 800 livres de revenu ; de Pierre Freslon, seigneur de la Freslonnière29, qui en avait 300 ; de Gilles Le Denoys, seigneur de Gautrel, et de Roland Sauvaiget, notaire, qui avaient chacun cent livres30. À ce niveau se recrutaient souvent les capitaines de places, comme le capitaine et le lieutenant du château de Landal qui moururent aussi à Saint-Aubin31.

  • 32 Parmi les riches seigneurs pour lesquels les montres ne donnent pas un chiffre de revenu, dans l'év (...)
  • 33 A. Du Paz, p. 614.

20Situons la noblesse riche à partir d'un revenu de 1 000 livres : ses membres étaient fort peu nombreux. Ils l'étaient un peu plus dans l'évêché de Saint-Malo où ils étaient au nombre d'une trentaine. C'est dans ce diocèse que la proportion des défaillantes remontes sensiblement, à partir de 1 200 livres, et atteint 40 %. Mais dans l'ensemble de plusieurs évêchés, les défaillants restaient moins fréquents. Considérons, dans les quatre évêchés de Dol à Tréguier, tous les riches seigneurs auxquels en 1480 nous connaissons32 un revenu compris entre 1 400 et 2 000 livres, au nombre de treize. Trois seulement ont fait défaut, tous trois de l'évêché de Saint-Malo : Eustache H ingant, seigneur de Hac, appartenant à la maison du vicomte de Rohan, lequel était alors en état d'arrestation sur l'ordre du duc ; François d'Ust, seigneur de Talhouët, et le sire de la Chapelle et de Molac. Deux étaient excusés, Jean de Rohan du Gué-de-l'Isle, de la maison du vicomte de Rohan, et Jacques de Beaumanoir, mineur. Cinq se sont présentés équipés en hommes d'armes : Jehan de Chateaubriand, seigneur de Beaufort, Amaury du Chastelier, Jehan de La Lande, seigneur de Guignen, Jehan de Penhoët, seigneur de Kerrimel, et Pierre Péan, seigneur de la Roche-Jagu. Particulièrement significative est la comparution du dernier, lequel s'est fait tuer à Saint-Aubin-du-Cormier33. Trois, enfin, servaient le duc, en appartenant soit à sa maison, Guyon de La Motte, seigneur de Vauclerc, et Roland Madeuc du Guémadeuc, soit à une compagnie d'ordonnance, Guillaume de Rieux, sire de Châteauneuf. En tout, dans ces quatre évêchés, entre 1 400 et 2 000 livres, la proportion des défaillants en 1480 n'était donc encore globalement que de 23 %.

  • 34 Dom Morice, III, 433, 436,474-475. Pour une analyse nominative, M. Nassiet, 1996, p. 12-13.
  • 35 Les seigneuries du vicomte de Coëtmen étaient d'un rapport d'environ 3 000 livres, A. de Barthélemy(...)

21Après les barons, qui ne figurent pas dans les montres car ils avaient le privilège d'être dispensés du service féodal, les seigneurs les plus riches avaient des revenus de 3000 ou 4000 livres. Dans les cinq évêchés septentrionaux, les montres donnent un chiffre de revenu à ce niveau pour trois personnages seulement, tous trois dans le diocèse de Saint-Malo : le sire d'Acigné, François Angier, seigneur du Plessis, et le sire de Maure ; les deux derniers avaient assez d'affinité entre eux pour conclure une alliance matrimoniale peu après. Tous trois ont fait défaut à la montre de 1480, ce qui paraît bien significatif car leur participation aux intrigues nouées à partir de 1484 est bien avérée. À Nantes le 7 avril 1484, un des principaux instigateurs du complot contre Landais était le sire de Rieux, maréchal de Bretagne ; il se mit à la tête des hommes qui s'emparèrent par surprise du château ducal (une bonne partie étaient des soudards de sa compagnie d'ordonnance) avec le sire du Plessis-Anger ; peu après, d'autres riches seigneurs les rejoignirent à Ancenis, comme les fils du sire d'Acigné. Au cours de l'hiver suivant, les rebelles furent rejoints par les sires de Maure et de Molac34. Toutefois, d'autres très riches seigneurs ont servi le duc fidèlement. Le vicomte de Coëtmen, en 1480 commissaire de la montre de Tréguier, et le sire de la Hunaudaye, membre de la maison ducale, ont servi fidèlement lors du siège de Nantes en 1487 ; Pierre du Pont, seigneur de Rostrenen s'est fait tuer à Saint-Aubin-du-Cormier35. Ainsi, même au plus haut niveau, les intrigants n'ont constitué qu'une fraction, certes agissante.

22Dans l'ensemble, les intrigues de quelques-uns, certes préjudiciables à l'efficacité du pouvoir ducal, ne doivent pas cacher la fidélité du plus grand nombre. Ces statistiques suggèrent qu'une grande majorité de la noblesse bretonne était prête à agir fidèlement. Encore fallait-il qu'elle ait des perspectives. Celle que proposait la maison de Rohan était beaucoup plus cohérente qu'on ne le dit habituellement.

La stratégie du vicomte de Rohan

  • 36 A. La Borderie et B. Pocquet, p. 468, 562.
  • 37 J.-P. Leguay, op.cit., p. 407.

23Le vicomte Jean II de Rohan n'a pas bonne presse. Pocquet36 le taxe régulièrement de « trahison », non seulement en 1488-1489 pour avoir combattu du côté du roi, mais dès 1470 lorsque le vicomte se rendit auprès de Louis XI. Plus récemment, pour Jean-Pierre Leguay37, les Rohan et autres Rieux semblent avoir été incapables de concevoir d'autres actions que « combinaisons » et « intrigues ». Il est vrai que le projet politique des Rohan était d'abord la promotion de leur propre lignage au trône ducal. Mais le travail de l'historien ne consiste pas à porter sur un tel projet un jugement moral, en le taxant d'ambition ou de vanité ; il consiste à la comprendre, en le situant par rapport aux conceptions socioculturelles qui prévalaient en ce temps.

  • 38 Dom Morice, III, 209.
  • 39 Dom Morice, III, 208. M. Nassiet, « Dictionnaire des feudataires des évêchés de Dol et Saint-Malo » (...)
  • 40 Dom Morice, II, 1720.

24La première « trahison » du jeune vicomte aurait donc été, dès 1470, de quitter la Bretagne en secret pour se rendre auprès de Louis XI, qui l'accueillit à bras ouverts en le gratifiant d'une considérable pension de 8 000 livres. Il faut cependant relativiser ce paiement d'une pension, que l'on évoque généralement en laissant entendre que le pensionnaire se vendait corps et âme... C'était une pratique absolument générale, de la part des grands, que de pensionner des personnages quelque peu inférieurs, car c'était une façon de manifester leur propre éminence, conformément au modèle du don étudié par Marcel Mauss. Il n'était pas scandaleux, en soi, que le roi pensionne un grand seigneur qui était établi, tout de même, dans le royaume. À Amboise, le vicomte eut l'occasion d'exprimer le motif de son départ auprès d'un nommé Payen Gaudin, qui en rendit témoignage : « Il avait quitté la cour du duc parce que le duc ne le considérait nullement, n'ayant égard qu'au seigneur de Lescun et aux étrangers, qui le gouvernoient38 ». C'est un peu plus loin que nous pourrons commenter ce propos. Interrogé de même en 1470, un proche du vicomte, Guillaume de Chasteautro39, affirme que « le duc n'ayant point d'enfans, le vicomte était alors regardé comme le présomptif héritier du duché ». En 1470, François II était veuf depuis un an de son épouse Marguerite de Bretagne, d'ailleurs sa cousine du 2e au 3e degré, laquelle ne lui avait pas laissé d enfant. La difficulté à avoir une postérité était assez générale pour qu'une telle situation commençât à faire naître des supputations sur un risque d'extinction du lignage de Bretagne. Il était donc normal que l'on s'enquière de l'identité de l'héritier présomptif, et le vicomte de Rohan considérait déjà que c'était lui. La maison de Penthièvre, qui s'était compromise en 1420, venait de tomber en quenouille40, et son héritière passait après tous ceux qui étaient censés descendre des ducs par les mâles. La question est de savoir à quel titre le vicomte de Rohan pouvait se regarder comme l'héritier du duché.

  • 41 À l'occasion du mariage de la fille aînée de François Ier avec l'héritier présomptif, le futur Fran (...)
  • 42 J.-P. Leguay, op.cit., p. 397-399.
  • 43 Un jeton en argent de la chambre des comptes de la vicomté de Rohan présente un écu couronné, parti (...)

25Généralement les historiens considèrent que ce n'était du fait que de son épouse. Celle-ci était en effet Marie de Bretagne, fille cadette du duc François Ier. Le traité de Guérande de 1365, dont le principe avait été rappelé lors des états de 145541, prévoyait « que la succession dudit duché ne viendra point à femme tant qu'il y ait hoir masle descendant de la ligne de Bretagne ». Faute de rejeton mâle du lignage, le duché était dévolu au membre féminin du lignage le plus proche du duc, et, entre le décès de Marguerite de Bretagne et la naissance d'une fille à François II en 1477, Anne, la plus proche parente était Marie de Bretagne, l'épouse du vicomte de Rohan. Cette alliance dut certes nourrir et accroître les ambitions du vicomte. Mais pour Jean-Pierre Leguay, ce n'est pas seulement avant 1477 que Jehan II de Rohan « s'imagine avoir des droits légitimes sur le trône ducal par son mariage avec Marie de Bretagne ». Selon cet auteur42, « en substance », Jehan II affirmait que Marie de Bretagne restait la première héritière du duché, c'est-à-dire qu'une priorité était détenue par les filles de François Ier, ce qui était une contestation rétrospective de la succession intervenue à la mort de ce dernier en 1450, et par là même du traité de Guérande de 1365 ! Jean-Pierre Leguay prête donc à Jehan de Rohan une vision tout à fait irréaliste, ce qui l'amène à écrire que son mariage avec Marie de Bretagne lui avait « fait perdre la tête » ! Cette reconstitution de l'argumentation de Rohan est grave car elle attribue une position aberrante à l'un des tous premiers acteurs sur la scène politique bretonne. Certes, Jehan II de Rohan n'a pas manqué de rappeler l'éminente position généalogique de son épouse, notamment par l'héraldique43. Néanmoins, c'est tout à fait à tort, pensons-nous, que les historiens lui prêtent cette argumentation.

  • 44 « pour ce qu'il estoit en ligne masle et le prochain de son sang à succéder à ladicte principauté » (...)
  • 45 Ibid., p. CXCIX.
  • 46 Ibidem, p. CCXIX-CCXX. Nassiet, « Dictionnaire... », n° 287.
  • 47 « Il a tousjours ouy dire en plusieurs lieux et congrégations de plusieurs gens de bien, dignes de (...)
  • 48 Ibid., p. CLXXXVII. Cette théorie devait expliquer pourquoi alors le blason de Rohan n'avait rien d (...)
  • 49 J. Kerhervé, op. ci t., 1980.

26Les Rohan croyaient avoir un autre fondement à leurs prétentions. En 1479, dans son mémoire contre le comte de Laval pour la préséance aux états, le vicomte Jehan II affirme être le premier héritier présomptif du duc, parce qu'il lui était apparenté en ligne masculine44. En fait, d'après un témoin entendu lors de l'enquête sur la même affaire, ce rapport de parenté et cette prétention successorale étaient déjà exprimés oralement par le vicomte Alain et son premier fils45, c'est-à-dire dès la première moitié du xve siècle. Il y avait donc là un discours qui n'était pas propre à Jehan II, mais qui était celui d'une lignée. Ce discours était fondé sur une généalogie dont trois témoins décrivirent, en 1479, la diffusion orale, sous forme notamment de propos de tables lors de dîners. Pour ces témoins, ce rapport de parenté, et la qualité d'héritier qui en résultait, avaient été reconnus et explicités par les ducs Jean V et Arthur. Un vieillard de petite noblesse demeurant à Guer, Benoît de Bellouan, se dit témoin oculaire d'une déclaration du duc Jean V, avant 1442 donc, faite, lors d'un repas, au vicomte de Rohan en l'appelant « beau cousin » : « sy mes fils & frères décédoient sans hoirs masles, vous succéderiez à la duché, car vous estes le plus proche en ligne masculine à y succeder que nul autre46 ». Le même témoin rapporte que le même avis fut formulé par le duc Arthur à l'automne 1457. D'après ces témoins, le vicomte Alain, ses serviteurs et divers gentilshommes47 racontaient que les Rohan étaient issus « de père en fils en droicte ligne masculine » du troisième fils du roi Conan, dont l'aîné, Mériadec, avait été saint, et dont le second avait succédé à la principauté48. Cette généalogie orale était une variante de la généalogie recopiée dans plusieurs chroniques manuscrites49, selon laquelle la maison ducale descendait du roi Conan Mériadec. Elle scindait le nom de ce dernier et en attribuait les deux éléments à deux personnages, père et fils, et elle ajoutait une ligne masculine cadette. En matière de généalogie comme en d'autres domaines, l'esprit critique, même de la part des plus érudits, ne s'est développé qu'à partir de la fin du xvie siècle. Au xve siècle, une telle généalogie était crédible. La question est alors de savoir dans quelle mesure elle était connue et acceptée.

  • 50 Dom Taillandier, p. CLXXXVII et CXCIX.
  • 51 Bibl. nat. Paris, fonds franç. 22321, p. 866. G.H. Doble, qui a découvert ce document, en a publié (...)

27Or ce fragment de généalogie était affirmé aussi par l'histoire de la vie de saint Mériadec, à laquelle une réception assez étendue était assurée par le fait que celui-ci était reconnu comme ayant été évêque de Vannes. En l'occurrence et comme souvent, l'oral était lié à des écrits. Deux des témoins déjà invoqués citèrent des manuscrits sur saint Mériadec : l'un avait lu le légendaire de la cathédrale de Vannes, l'autre s'était fait lire par son chapelain le vieux bréviaire de celui-ci50. Il nous reste une copie51, faite au xviie siècle, d'une Vita Mercadoci. Pour G.H. Doble, il s'agit d'une copie du Légendaire manuscrit de Vannes du xve siècle, aujourd'hui perdu, dont se servirent d'ailleurs les compositeurs du Bréviaire vannerais de 1589. Cette Vita Mercadoci affirme que

  • 52 Souligné par nous. G.H. Doble, 1936, p. 101.

« le bienheureux Mercadoc était de la race des Bretons, descendant en ligne directe de la consanguinité du roi Conan le magnifique. Son père naturel était ministre du duc de la Petite Bretagne, ainsi qu'on le trouve rapporté dans les chroniques. Le vicomte de Rohan passait pour son parent.
Or, on trouve dans l'antiquité que ce vicomte de Rohan et ses successeurs descendent en ligne directe dudit Conan, à l'exclusion des autres Bretons52. »

  • 53 R. Blanchard, n° 1818.

28Selon cette Vita, Mériadec, « habitué à se montrer vêtu de pourpre », quitta le monde et établit son ermitage « dans la vicomté de Rohan », à « mille pas du château de Pontivy ». Les membres de sa parentèle vinrent le voir (cognati et agnati), parmi lesquels le vicomte de Rohan ; à la demande et avec l'aide du saint, Rohan débarrassa le pays des voleurs qui l'infestaient, à la suite de quoi furent fondées trois foires à Noyai. Ces foires étaient bien réelles et leur fondation était ancienne : dès 1428 un acte ducal53 reconnaît qu'une foire en l'honneur de saint Mériadec fut fondée en la vicomté de Rohan « autresfoiz ».

29Cette Vita Mercadoci affirme que le vicomte de Rohan de jadis passait pour le « parent » de Mériadec, tandis que les clients de la maison de Rohan racontaient qu'il était frère du saint, mais en cette époque où l'oral était bien plus répandu que l'écrit, l'existence de plusieurs versions différentes n'est pas étonnante.

  • 54 Nous avons montré le caractère intentionnel de cette nomination et sa signification dans M. Nassiet(...)
  • 55 Il a été publié par Whitley Stokes en 1872, G.H. Doble, p. 90.
  • 56 G.H. Doble, p. 107. B. Merdrignac, t. I, p. 192.

30L'histoire de la vie de saint Mériadec avait donc une certaine diffusion dans l'évêché de Vannes, et d'abord dans les paroisses où un culte lui était rendu, non seulement à Stival où était conservée une très vieille cloche associée au saint, mais en outre, en dehors de la vicomté de Rohan, au nord d'Auray et Vannes. Dans la paroisse de Baden un village est nommé Saint-Mériadec ; limitrophe de celle-ci, la paroisse de Plumergat avait une trève nommée Mériadec ; il y avait une chapelle ancienne de Saint-Mériadec en Pluvigner. En outre, dans l'évêché de Tréguier, en Plougasnou, la chapelle de Saint-Jean-du-Doigt, bâtie en 1440 pour abriter une relique de Saint-Jean-Baptiste, renferme une statue de saint Mériadec et un reliquaire que l'on utilisait le jour du pardon. Au début du xviie siècle, cette chapelle conservait aussi un texte manuscrit, le Légendaire de Saint-Jean-du-Doigt, qui comportait une Vie de saint Mériadec, laquelle a été utilisée par Albert Le Grand. Celui-ci précise qu'il « y avoit anciennement une chapelle de Saint-Mériadec, au lieu où à présent est la chapelle de Saint-Jean dite du Doigt, et s'appelle le vallon où est située ladite chapelle Traoun-Meriadec, c'est-à-dire le Val-de-Mériadec ». Curieusement en 1480 demeuraient dans cette paroisse deux feudataires, père et fils, portant Mériadec comme patronyme, et prénommés respectivement Hector et Arthur ; ces allusions troyenne et arthurienne décèlent une intention délibérée et montrent que les vieilles généalogies fabuleuses n'étaient pas confinées au monde restreint des lettrés54. À la fin du xve siècle, dans l'évêché de Tréguier, ce culte de saint Mériadec était assez vivant pour que des fidèles de Cornwall, sans doute des pèlerins venus au pardon de Tréguier, puissent y recueillir des renseignements sur ce saint, et plus précisément semble-t-il, la Vita latine que nous avons citée. En effet, en Cornwall, la paroisse de Camborne était dédiée à saint Mériadoc ; son curé en 1497 était inscrit comme rector ecclesie parochialis Sancti Meriadoci de Cambron. (Meriadoc était un nom gallois et la toponymie de Bretagne, de Cornwall et de Galles suggère que ce saint soit parti du pays de Galles). À la fin du xve siècle, des fidèles de Cornwall recueillirent donc en Bretagne la Vita de Mériadec et s'en servirent pour rédiger un mystère en comique, Beunans Meriasek, qui nous est conservé dans un manuscrit de 150455. L'histoire de la vie de Mériadec, évêque de Vannes, n'était donc pas confinée aux pays, d'ailleurs fort vastes, possédés par la maison de Rohan, ni dans lesquels ceux-ci avaient des clients. Enfin cette Vita ne résultait pas d'une création récente. L'analyse du texte montre que celui-ci a été tiré d'une Vita antérieure, perdue, qui ne peut pas être postérieure au xiie siècle56.

31Ainsi donc, l'idée de l'existence d'un rapport de consanguinité entre saint Mériadec, les vicomtes de Rohan et la maison de Bretagne ne résultait pas d'une création récente. Ce n'était ni une supercherie, ni une falsification perpétrée et répandue pour les besoins de la circonstance, mais une tradition déjà ancienne. Ce contexte culturel foisonnant, hagiographique et généalogique, comprenant quelques rares manuscrits et surtout des propos de table, nous semble montrer au moins que le vicomte Jean II de Rohan pouvait croire sincèrement qu'il descendait des princes de Bretagne « en ligne directe », et que d'autres pouvaient y croire aussi.

Église de Stival (xe siècle, Morbihan). Fresque de la vie de saint Mériadec

  • 57 D. Dufief-Moirez, p. 247.
  • 58 L'intention politique était bien plus forte que ce qu'y voit C. Prigent, la volonté de « se découvr (...)

32Un témoignage archéologique révèle combien cette généalogie revêtait d'importance aux yeux du vicomte Jean II : les fresques se trouvant dans l'église de l'une des paroisses où était rendu un culte à saint Mériadec, Stival. L'édifice qui est aujourd'hui l'église paroissiale a longtemps été une chapelle (l'église paroissiale était alors un autre édifice qui était dédié à saint Pierre), et c'est en tant que chapelle qu'il a été fondé. Selon Denise Dufief-Moirez, la construction en a été effectuée dans la seconde moitié du xve siècle, en deux phases rapprochées, la nef d'abord, le chevet ensuite. Les fresques murales du chœur représentent la vie de saint Mériadec. La quatrième image montre la fameuse scène où le saint prie le vicomte de Rohan de purger le pays des voleurs. Les costumes contribuent à la datation de l'œuvre : le seigneur et sa suite sont vêtus à la mode de la fin du xve siècle : « hauts-de-chausses unis ou rayés, pourpoints resserrés à la taille, évasés au-dessous et garnis de collerettes ou d'un camail d'hermines, couvre-chefs à larges bords ». Les chaussures, plus modernes que les poulaines, contribuent à dater la fresque dans les vingt dernières années du xve siècle57. Or la légende de la première scène, écrite en caractères gothiques, indique qu'il s'agit de « saint Mariadeuc, filz du duc de Bretaigne, descendu de la ligne du roy Cognan, et consanguin prouche du vicomte de Rohan ». Cette fresque constituait donc une autre forme d'affirmation du rapport de consanguinité entre la ligne des vicomtes de Rohan et la ligne ducale. Sa situation, au cœur de la vicomté et à quelques kilomètres de Pontivy, où le vicomte Jean II faisait alors construire un nouveau château, montre le caractère central et fondamental qu'occupait l'histoire de saint Mériadec dans le capital symbolique de la maison de Rohan. Le fait que ces fresques aient été peintes sensiblement au moment où le vicomte affirmait explicitement, dans le mémoire de 1479, sa prétention à avoir le premier rang à la succession au duché, montre la précision58 de l'intention politique de ce message iconographique : cette fresque était un des moyens d'énoncer le discours du vicomte pour revendiquer le duché, et justifier sa revendication.

33En effet, cette généalogie, si l'on y ajoutait foi, avait des conséquences politiques importantes quant à la position du vicomte. Si l'on admettait qu'il était le représentant d'une ligne masculine cadette, c'est à titre personnel qu'il était en 1470 l'héritier présomptif, en vertu du traité de Guérande qui donnait la priorité à tout « hoir masle » avant toute femme. C'est alors à bon droit qu'il pouvait déjà briguer un rôle politique éminent. Le fait qu'il ait quitté le duc en 1470 est assez analogue au comportement de Condé pendant la Fronde : c'est celui d'un grand seigneur qui estime que son rang, celui de premier prince du sang, devrait lui valoir d'être l'un des tous premiers conseillers du souverain, faute de quoi il est en droit de se retirer auprès d'un meilleur prince. Le cas de Condé montre d'ailleurs qu'un tel comportement était susceptible d'être pardonné.

  • 59 Nous l'avons décrite dans la noblesse bretonne vers 1500, M. Nassiet, 1991, p. 203-204. L'hostilit (...)

34Puis, après la naissance d'Anne en 1477, Jean de Rohan pouvait considérer que son droit primait sur celui de cette dernière, ce qui pourrait expliquer l'animosité qui a existé entre les deux personnages : le rapport de parenté entre une héritière et un collatéral co-lignager est souvent générateur d'une telle animosité59.

  • 60 Nous avons systématiquement étudié ce langage héraldique de l'occurrence d'une héritière dans « Al (...)
  • 61 J.- P. Leguay, op. cit., p. 414.

35Enfin, cette identité de membre du patrilignage de Bretagne avait aussi des incidences en matière matrimoniale, dès lors que c'était une héritière qui était à marier. Dans l'ensemble des combinaisons matrimoniales, le mariage d'une héritière était un type très spécifique car il comportait un enjeu très supérieur à celui d'une fille ayant un frère. Cette dernière, ayant par définition un statut de cadette, ne pouvait avoir qu'une dot ou une part minoritaire de l'héritage, tandis qu'une héritière apportait la majeure partie ou la totalité d'une seigneurie, avec son chef-lieu, manoir ou ville capitale, et son site funéraire : une fortune terrienne et un capital symbolique tout à la fois. La spécificité de ce type d'occurrence familiale était si bien reconnue qu'il donnait lieu à des pratiques héraldiques particulières, par exemple la création d'un écartelé60. On considérait que le patrimoine devait rester à des parents de la lignée tombée en quenouille et on choisissait souvent de marier l'héritière dans sa parentèle. On la mariait de préférence au sein même de son patrilignage, c'est-à-dire à un collatéral descendant d'un ancêtre commun en ligne masculine. À défaut, on se contentait d'un parent cognatique, c'est-à-dire d'un consanguin apparenté par les femmes. Un exemple illustrant ce dernier type au niveau dynastique et dans la période qui nous intéresse ici est le mariage en 1486 de la fille unique du roi d'Angleterre, Edouard IV, avec Henri Tudor, prétendant au royaume en tant que descendant, par sa mère, des Plantagenêts-Lancastres ; ces époux étaient parents au cinquième degré. De ce dernier type relevait aussi l'un des prétendants d'Anne de Bretagne en 1491, Alain d'Albret, dont la grand-mère maternelle était une fille de la maison de Bretagne. Des mariages effectivement conclus, mais aussi des projets inaboutis, ainsi que les rapts d'héritières à marier, fréquemment commis par quelque cousin, tout se passait comme si les consanguins considéraient avoir un droit privilégié sur la fille héritière. C'est la raison pour laquelle Alain d'Albret fut ulcéré de la promesse de mariage faite à Maximilien de Habsbourg, au point qu'il résolut d'en tirer une grande vengeance, et qu'il le fit en mars 1491 en livrant au roi la place de Nantes. Les historiens considèrent aussi cet acte comme une « trahison61 ». Mais dans les conceptions nobiliaires, qui étaient déterminées d'abord par des considérations de parenté, c'étaient les consanguins qui se trouvaient spoliés, non pas parce que le mari était étranger au royaume ou au duché, mais parce qu'il était extérieur à la parentèle de la promise (Cf. La parentèle d'Anne de Bretagne, ci-dessous).

  • 62 Cf. ces mariages endogames dans M. Nassiet, op.cit., 1991, p. 209.

36Plutôt qu'à un parent cognatique, c'est à un membre du patrilignage, descendant d'un ancêtre commun en ligne masculine, et représentant généralement une branche cadette, qu'on préférait donner une héritière. Cette norme est illustrée par maints exemples dans de nombreuses riches maisons, en Bretagne et dans toute la France. Ce fut la solution choisie par la maison ducale de Bourbon en 1505. Les Rohan multiplièrent les mariages au sein de leur lignage, surtout si l'on considère qu'au delà du nom de Rohan, ils formaient une maison des macles qui s'étendait, notamment, aux Montauban62. La maison de Bretagne s'était elle-même conformée à cette norme en 1455 en mariant la fille aînée du défunt duc François Ier à l'héritier du duché, le futur François II. Par conséquent, si les Rohan étaient regardés comme formant une ligne masculine de la maison de Bretagne, c'est avec le fils du vicomte de Rohan que le mariage d'Anne aurait été le plus conforme à cette norme préférentielle de mariage d'une héritière. La fréquence de l'hypogamie des filles le rendait parfaitement admissible ; la maison de Rohan s'était d'ailleurs déjà vu donner deux épouses par celle de Bretagne. Socialement, ce mariage était conforme aux normes matrimoniales ; politiquement, ce projet n'était pas une intrigue, mais un projet légitime de la part d'une lignée collatérale. Le vicomte de Rohan considérait être un cousin co-lignager du duc, et il a élaboré une stratégie pour recueillir le duché par héritage, puis par mariage.

La parentèle d'Anne de Bretagne

La parentèle d'Anne de Bretagne
  • 63 Jusqu'en 1483, il était prévu, par traité, que l'une des filles épouserait le fils aîné du roi d'An (...)

37Or ce mariage, certes conforme à l'intérêt du lignage de Rohan, pouvait aussi perpétuer l'existence et l'indépendance du duché. Le maréchal de Rieux a d'ailleurs pu signer une promesse au terme de laquelle ce mariage était « très nécessaire pour le bien, utilité et entretenement du païs et duché de Bretaigne ». Ce mariage aurait coupé court aux convoitises des autres prétendants, et notamment celles du roi, auquel il n'aurait donné ni raison légitime ni prétexte pour envahir le duché. En temps de guerre, il aurait rangé les vastes possessions des Rohan aux côtés des forces ducales alors qu'elles l'ont été contre celles-ci. En 1488, l'une des causes principales de la défaite de Saint-Aubin-du-Cormier a été l'impéritie du commandement breton, due à la paralysie résultant de la division entre les principaux chefs ; or le fils aîné du vicomte de Rohan a combattu dans l'armée bretonne, montrant ainsi sa détermination et son attachement à l'indépendance du duché. Si l'héritière lui avait été donnée en mariage, en sa personne l'armée bretonne aurait eu à sa tête son futur duc ; cette circonstance aurait été de nature à réduire les atermoiements du commandement breton, et, certainement, à stimuler la ferveur de ces combattants dont nous avons vu la fidélité. François II préféra échanger ses filles contre des promesses de gens d'armes63, on sait avec quel résultat.

  • 64 M. Nassiet, « Un cas de manipulation de la parenté : la maison de Derval », 1996.
  • 65 Dom Morice, III, 525.
  • 66 Dom Morice, III, 530.

38Dans la chaîne des causes du rattachement de la Bretagne au domaine royal, une des premières se situe dans les années 1485-1491, et surtout 1485-1488 : le refus, par le pouvoir ducal, du projet des mariages avec les fils de Rohan. On peut envisager les raisons pour lesquelles le duc n'a pas voulu donner ses filles aux Rohan. La généalogie qui reliait ceux-ci à Mériadec et la maison de Bretagne avait la créance des ducs Jean V et Arthur III, selon les témoins de 1479, mais elle ne faisait peut-être pas partie de la culture personnelle de François II puisque, rejeton de la branche cadette, il avait passé l'essentiel de son adolescence dans le Val de Loire, et avait été instruit par un précepteur normand. En outre la relation personnelle entre Jehan de Rohan et François II a toujours été difficile. Au sein de la noblesse bretonne, les Rohan avaient de solides adversaires. C'est peut-être pour faire obstacle à leurs prétentions que le baron de Derval avait exhumé de vieilles armoiries écartelées avec deux quartiers de Bretagne64 ; longtemps le comte de Laval leur est resté hostile, jusqu'à l'automne l48665 (à cette date, c'était la fille cadette que le pouvoir ducal envisageait de marier à Maximilien de Habsbourg66). Enfin, auprès du duc il n'y avait personne pour appuyer le projet de Rohan ; étant donné le rôle des femmes dans les négociations matrimoniales, il en serait allé différemment si Marguerite de Bretagne, tante du prétendant Rohan, avait vécu et avait été la mère de l'héritière.

  • 67 C'est cette dimension qui nous semble manquer à la tentative de démonstration, d'ailleurs très bien (...)

39Plus généralement, la présente analyse nous semble confirmer combien les conceptions et les prises de position politiques étaient déterminées par les faits de parenté, c'est-à-dire, rappelons-le, non pas les positions résultant directement du substrat biologique, lesquelles étaient souvent mal connues, mais les représentations qu'on s'en faisait. L'importance de ce phénomène justifie, pour en rendre compte, une démarche véritablement d'anthropologie historique67.

Bibliographie

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Taillandier, dom Charles, Histoire ecclésiastique et civile de Bretagne, t. 2, Paris, 1756.

Notes

1 « On en trouve la preuve dans les nombreux mandements comminatoires que le duc est obligé de lancer pour rappeler aux gentilshommes l'obligation d'assister aux montres ou revues militaires. Beaucoup s'y dérobent ou cherchent des prétextes d'exemption », A. La Borderie et B. Pocquet, p. 467. Cette interprétation est reprise par Y. Gicquel, p. 100. (N.B., les références bibliographiques détaillées se trouvent à la fin de l'article, p. 126-128.)

2 M. Nassiet, Noblesse et pauvreté, 1993, p. 91.

3 Expression de J.-P. Leguay, p. 406.

4 Nous avons esquissé une étude historique comparative de ces crises de succession selon ce point de vue dans M. Nassiet, « Parenté et successions dynastiques aux 14e et 15e siècles », Annales, 1995.

5 ADLA, E 147. Dom Morice, III, 439-440, et 500.

6 L. Stone, 1965, p. 656-658.

7 Bibl. mun. Nantes, fonds Bizeul ; publié par dom Morice, III, 463, et S. de LA Nlcolliere-Teijero, 1894.

8 A. La Borderie et B. Pocquet, p. 563.

9 G. Duby, dans Famille et parenté..., p. 251 ; exemples dans G. Duby, 1953, p. 463, 626.

10 Nous l'avons ébauchée dans M. Nassiet, « Réseaux de parenté et types d'alliance dans la noblesse (xve-xviie siècles) », 1995, p. 113 sqq.

11 Bibl. mun. Saint-Brieuc, ms 31, 33, 35, 38. M. Nassiet, « Dictionnaire des feudataires des évêchés de Dol et Sain-Malo en 1480 », 1990-1992 ; « Dictionnaire des feudataires de l'évêché de Saint-Brieuc », 1996. Le second, ainsi que la présente analyse, ont été rendus possibles par la saisie informatique des rôles réalisée grâce aux moyens consentis par le Crhisco, unité de recherche de l'université de Rennes 2 associée au CNRS.

12 Dom Morice, II, 1133-1134 ; 1287-1291.

13 Dans la montre de l'évêché de Rennes de 1541, dans presque chaque article, le montant du revenu est suivi de la précision « de rente noble », G. Sevegrand, 1993, 1994. Cf. aussi M. Nassiet, « Dictionnaire des feudataires de l'évêché de Saint-Brieuc », 1996, p. 10.

14 ADLA, B 8,f° 96 v°.

15 -Ce qui montre bien que le chiffre de revenu était porté à l'avance, c'est que dans les rôles bretons de 1480, le revenu est indiqué aussi bien pour les défaillants que pour les présents. Cela ressort à l'évidence aussi des doubles mentions de deux paroisses de l'archidiaconé de Porhoët, Irodouër et Miniac-sous-Bécherel, dont les feudataires auraient dû se montrer à Ploërmel, mais qui préférèrent aller à Dinan parce que cette ville était moins loin de chez eux ; à Ploërmel, quoiqu'ils soient indiqués défaillants, mention est faite de leur revenu ; à Dinan, leur équipement est décrit, puiqu'ils furent présents, mais leur revenu n'est pas indiqué, car ils n'étaient pas attendus. Ainsi la mention du chiffre de revenu est sans rapport avec la présence effecive du feudataire, elle ne résultait pas d'une déclaration faite le jour de la montre, et avait donc été portée à l'avance sur le rôle, Bibl. mun. Saint-Brieuc, ms. 35.

16 En 1481, à la montre générale de l'évêché de Cornouaille, était présent le procureur du duc, « commis du duc... pour faire enregistrer par escript la dicte monstre ». Un nouveau rôle était donc confectionné, a posteriori, et c'est celui en l'occurrence qui a été publié, Freminville, p. 316.

17 Par exemple, « Anceau de Botmeur, archer en brigandine, et dampuis a remonstré le procureur de Cornouaille à messieurs les commissaires, que le dict de Botmeur tenoit heritaige de six a sept vingt livres de rente, en cet evesché, sans comprendre l'outre plus, et l'avoit trouvé par enqueste, sur quoy a esté enjoinct audict de Botmeur, absent, avoir homme de deffense en sa compagnie... », Chevalier de Freminville, p. 364.

18 Pour plus de détails, M. Nassiet, 1990, p. 184 ; pour une étude critique des chifres de revenu, Id., Noblesse et pauvreté, 1993, p. 43-44.

19 Ibidem, p. 50.

20 M. Nassiet, « Dictionnaire... », 1992, p. 248-250 ; 1996, p. 22.

21 J. Kerhérve, op. cit., 1987, p. 229.

22 Ibid., p. 324.

23 Pour des cas nominatifs, M. Nassiet, 1996, p. 1 l-12..Pour l'exemple de Guillaume de Rosnyvinen, M. Jones, 1991.

24 Kerherve, op. cit.. p. 723.

25 M. Nassiet, Noblesse et pauvreté, op. cit., p. 49.

26 M. Nassiet, « Dictionnaire des feudataires des évêchés de Dol et Saint-Malo... », 1992, p. 251.

27 ADLA, B 2184.

28 En Lanmeur, ADLA, B 1785.

29 ADLA, B 2118.

30 Comte de Rosmorduc, 2, p. 135. ADLA, B 1610. M. Nassiet, « Dictionnaire... », 1996, n° 3 022 et 3555.

31 A. Du Paz, p. 446. Les trois capitaines qui assiégèrent Quintin en 1487 pour le duc étaient des hommes de moyenne noblesse de l'évêché de Tréguier, ayant 300 ou 400 livres de revenu ; l'un, Yvon de Roscerf, appartenait à la garde ducale, mais deux autres, Silvestre de Perrien et Pierre Le Long, avaient comparu pour le service féodal.

32 Parmi les riches seigneurs pour lesquels les montres ne donnent pas un chiffre de revenu, dans l'évêché de Dol, la dame de la Bellière a fait défaut, tandis que Jean de Coétquen appartenait à la maison du duc.

33 A. Du Paz, p. 614.

34 Dom Morice, III, 433, 436,474-475. Pour une analyse nominative, M. Nassiet, 1996, p. 12-13.

35 Les seigneuries du vicomte de Coëtmen étaient d'un rapport d'environ 3 000 livres, A. de Barthélemy et J. Geslin De Bourgogne, t. 6, p. 251 ; ADLA, B 11, P 3-5 ; ADCA, E 177 ; ADLA, B 2025.

36 A. La Borderie et B. Pocquet, p. 468, 562.

37 J.-P. Leguay, op.cit., p. 407.

38 Dom Morice, III, 209.

39 Dom Morice, III, 208. M. Nassiet, « Dictionnaire des feudataires des évêchés de Dol et Saint-Malo », n° 330.

40 Dom Morice, II, 1720.

41 À l'occasion du mariage de la fille aînée de François Ier avec l'héritier présomptif, le futur François II,dom Morice, I,1592 ; II, 1476.

42 J.-P. Leguay, op.cit., p. 397-399.

43 Un jeton en argent de la chambre des comptes de la vicomté de Rohan présente un écu couronné, parti, au 1 de Rohan, au 2 écarrelé de Rohan et de Bretagne (Bibl. nat. Paris, cabinet des médailles ; Y. Glcquel, p. 216, et photographie hors texte) ; un écartelé exprimait souvent que le personnage désigné était issu d'une héritière ou était marié à une héritière.

44 « pour ce qu'il estoit en ligne masle et le prochain de son sang à succéder à ladicte principauté », dom Taillandier, p. CLXI-CLXII, articles 2 et 4.

45 Ibid., p. CXCIX.

46 Ibidem, p. CCXIX-CCXX. Nassiet, « Dictionnaire... », n° 287.

47 « Il a tousjours ouy dire en plusieurs lieux et congrégations de plusieurs gens de bien, dignes de foy et d'honneur, que ledit vicomte et ses prédécesseurs estoient et sont issuz et extraitz des flz de Bretagne, sans mutation de ligne masculine », dom Taillandier, p. CLXXXVII.

48 Ibid., p. CLXXXVII. Cette théorie devait expliquer pourquoi alors le blason de Rohan n'avait rien de commun avec celui de Bretagne : on affirmait que le vicomte de Rohan avait porté les armes de Bretagne et que celles-ci avaient été changées miraculeusement « sur le corps & fierte » de saint Mériadec. Benoit de Bellouan ajoute qu'il vit sur un vieux vitrail de l'abbaye de Saint-Méen à Gaël, l'écu aux macles de Rohan chargé d'« un quartier d'hermines ». En fait, le plus ancien ancêtre assurément connu des Rohan est Guethenoc, vivant en 990, époux d'Alarun, H. Guillotel, p. 8 et 23.

49 J. Kerhervé, op. ci t., 1980.

50 Dom Taillandier, p. CLXXXVII et CXCIX.

51 Bibl. nat. Paris, fonds franç. 22321, p. 866. G.H. Doble, qui a découvert ce document, en a publié une traduction française, 1936, p. 100 sqq.

52 Souligné par nous. G.H. Doble, 1936, p. 101.

53 R. Blanchard, n° 1818.

54 Nous avons montré le caractère intentionnel de cette nomination et sa signification dans M. Nassiet, 1998, p. 91-93.

55 Il a été publié par Whitley Stokes en 1872, G.H. Doble, p. 90.

56 G.H. Doble, p. 107. B. Merdrignac, t. I, p. 192.

57 D. Dufief-Moirez, p. 247.

58 L'intention politique était bien plus forte que ce qu'y voit C. Prigent, la volonté de « se découvrir... des ancêtres prestigieux », p. 189.

59 Nous l'avons décrite dans la noblesse bretonne vers 1500, M. Nassiet, 1991, p. 203-204. L'hostilité des co-lignagers à l'égard d'une héritière est exprimée de façon particulièrement limpide par un des chants bretons de tradition orale, L'héritière de Keroulaz, composée dans la décennie 1570 : « Aucun de mes parents paternels ne m'a jamais voulu de bien ; ils ont toujours souhaité ma mort, pour hériter ensuite de ma fortune », F.-M. Luzel, t. 2, p. 135 et 139. Pour une analyse structurale de ce rapport de parenté, M. Nassiet, 1994, p. 22 (« un système d'attitudes »).

60 Nous avons systématiquement étudié ce langage héraldique de l'occurrence d'une héritière dans « Alliance et filiation dans l'héraldique des xive-xve siècles », 1994 ; sur la Bretagne, M. Nassiet, 1991, p. 193 sqq.

61 J.- P. Leguay, op. cit., p. 414.

62 Cf. ces mariages endogames dans M. Nassiet, op.cit., 1991, p. 209.

63 Jusqu'en 1483, il était prévu, par traité, que l'une des filles épouserait le fils aîné du roi d'Angleterre Edouard IV, lequel promettait 4000 archers. Finalement, François II promit sa fille aînée au roi des Romains, dès que celui-ci aurait fait son entrée en Bretagne à la tête de ses gens d'armes, ADLA, E 123, E 14.

64 M. Nassiet, « Un cas de manipulation de la parenté : la maison de Derval », 1996.

65 Dom Morice, III, 525.

66 Dom Morice, III, 530.

67 C'est cette dimension qui nous semble manquer à la tentative de démonstration, d'ailleurs très bien informée, d'Yvonig GICQUEL, dont la présente analyse rejoint le propos.

Table des illustrations

Titre Tableau 1 - Effectifs et revenus des feudataires en 1480. (Revenus en livres monnaies.)
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Titre Tableau 2 - Revenu noble par emploi et statut (évêchés de Dol et Saint-Malo, 1840). (Revenus en livres monnaies.)
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Titre Graphique 1 — Effectifis et revenus des feudataires de quatre évêchés en 1480.
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Titre Tableau 3 -Proportion des défaillants par classes de revenu
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Titre Graphique 2 - Proportion des défaillants par classes de revenu dans l'évêché de Saint-Brieuc, 1480
Légende Revenu annuel (en livres monnaie de Bretagne)
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Légende Église de Stival (xe siècle, Morbihan). Fresque de la vie de saint Mériadec
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Titre La parentèle d'Anne de Bretagne
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